Abeilles et reine

Des abeilles et la reine, marquée en bleu.

Apis mellifera est une des rares espèces eusociales. En d’autres termes, elle présente la vie sociale la plus évoluée chez certains animaux et insectes, caractérisée par le « fait qu’un même groupe d’individus vivant ensemble est divisé en castes, entre ceux qui sont fertiles et ceux qui ne le sont pas » (L’Internaute).

Ainsi, l’abeille sociale vit en très larges groupes ; selon la saison, leur nombre varie et peut atteindre jusqu’à 50 000 individus en saison estivale. Parmi ces derniers, on dénombre une reine, quelques milliers de faux-bourdons et une écrasante majorité d’ouvrières.

Les ouvrières représentent une unique caste mais remplissent de nombreuses fonctions diverses pour le groupe, réparties pour la plupart entre individus au fil de leur vie.

Nettoyeuses

Quelques heures après la naissance, les jeunes ouvrières acquièrent leur premier rôle fondamental pour maintenir une bonne hygiène dans le groupe : celui de nettoyeuses. Il s’agit principalement de nettoyer les 90 000 cellules composant le nid, où naissent les ouvrières et sont stockées les ressources. Cette tâche peut être accomplie jusqu’à l’âge de 30 à 50 jours environ.

Ce nettoyage est indispensable pour la reine qui ne pond que dans des cellules saines. Par ailleurs, on estime qu’une cellule nécessite en moyenne 4 minutes de nettoyage, réalisé par une trentaine d’ouvrières distinctes.

Ce rôle hygiénique est également primordial vis-à-vis de la tolérance à un acarien parasite ravageur des ruches : le varroa.

Abeille varroa

Abeille porteuse du varroa.

Outre le nettoyage des cellules, la ruche entière est aussi nettoyée, notamment des débris en tout genre qui s’amassent au fond de la ruche.

Nourrices

Les abeilles appartiennent aux insectes holométaboles : elles réalisent une métamorphose complète (comme les papillons), de la larve à l’adulte. Elles débutent ainsi au stade de l’œuf d’où éclot une jeune larve de quelques millimètres, qui grossit ensuite jusqu’à ce que les ouvrières scellent la cellule avec un opercule de cire. A partir de ce moment, les larves vont utiliser les ressources accumulées pour réaliser leur métamorphose. Elles tissent ensuite un cocon de soie qui les protégera durant le bouleversement physiologique que représente le stade nymphal. Durant ce stade, 5 mues se succèdent, la dernière aboutissant enfin à l’ouvrière adulte.

Stades de développement abeille ouvrière

Les stades de développement d’une ouvrière : de l’œuf à l’adulte (Source : Le traité rustica de l’apiculture).

Après la ponte, les larves sont nourries par les nourrices qui, dans un premier temps, leur apportent une gelée semblable à la gelée royale, puis enchaînent avec un mélange de miel et de pollen jusqu’à ce que la cellule soit scellée avec un opercule de cire. La reconnaissance du couvain (l’ensemble des cellules d’élevage) et de ses besoins est dirigée par le dégagement de phéromones particulières aux différents stades de développement.

On estime qu’une larve de couvain est ainsi visitée jusqu’à 7 000 fois, pour un maximum de 1 100 repas. Au mieux, une nourrice est capable de satisfaire les besoins d’un maximum de 3 larves.

Abeilles et larves

Une colonie d’abeilles et des larves.

Architectes et maçonnes

Le nid repose sur une construction en cire formée principalement par les cellules hexagonales connues de tous. Cette forme particulière a été démontrée comme étant énergétiquement ultra-fonctionnelle, garantissant la bonne tenue du nid.

Le “gros-œuvre” est réalisé par un groupe de maçonnes, construisant les cellules à base d’écailles de cire produites par des glandes abdominales spécialisées. Elles s’agrippent pour cela les unes aux autres, afin de former une chaîne où la température s’élève à plus de 35 degrés, rendant la cire malléable.

Abeilles alvéoles de cire

Manutentionnaires

Lorsque les ouvrières butineuses rentrent à la ruche avec du pollen et/ou nectar, elles cherchent des manutentionnaires pour s’en décharger.

Ces dernières prennent en charge le nectar et entreprennent sa digestion partielle. Ce nectar est stocké dans des cellules en périphérie du nid, puis asséché par ventilation jusqu’à atteindre une humidité inférieure à 18%, en-dessous de laquelle le miel reste liquide. La dernière étape pour le stockage à long terme est réalisée en apposant un opercule de cire au contact du miel, scellant ainsi le rayon pour une durée indéterminée.

Le pollen est déposé par la butineuse directement dans une cellule de stockage, ainsi qu’en périphérie du nid. Les manutentionnaires vont ensuite le malaxer en y ajoutant des enzymes digestives et du miel.

Cadre de cire abeilles

Des abeilles en plein travail sur un cadre.

Ventileuses

Les différentes étapes réalisées dans le nid nécessitent un contrôle important de la température, indispensable au développement du couvain, à la bonne tenue physique du nid, etc. La température du nid est gérée par des activités variées de chauffe, liée à l’activité métabolique de l’ensemble des individus de la ruche.

Cette gestion de la température est réalisée par les ventileuses qui se positionnent à l’entrée de la ruche et utilisent leurs puissants battements d’ailes dirigés dans le flux d’air pour l’accélérer et le réguler. Cette ventilation permet également le renouvellement en dioxygène de l’air dans le nid.

Lorsque la température au sein du couvain dépasse 36°C, les ventileuses humectent leurs pièces buccales et se positionnent dans le flux d’air. Cette évaporation d’eau réalise une véritable fonction de climatisation du nid et permet de maintenir la température du couvain dans une plage extrêmement stable par rapport aux conditions climatiques extérieures.

Abeilles en train de ventiler

Gardiennes

La défense du nid est indispensable pour empêcher l’intrusion des agresseurs. Celle-ci est assurée par les gardiennes (ouvrières âgées de 12 à 25 jours) qui, placées à l’entrée du nid, exercent avant tout une fonction d’observation à la recherche de mammifères, d’oiseaux et d’insectes. En cas d’attaque, elles se rassemblent et commencent par adopter une posture menaçante. Si ce premier signal ne suffit pas, elle se mettent à attaquer, piquer et enfin injecter leur puissant venin. Lors de l’attaque, les gardiennes émettent une phéromone particulière afin de recruter d’autres ouvrières pour faire face à la menace.

En cas de disette et lorsque plusieurs nids sont géographiquement proches, certaines colonies plus agressives tentent également de piller des colonies plus faibles. Afin de repérer de telles intruses, les gardiennes vérifient l’identité de chacune des abeilles entrant dans le nid grâce à une signature phéromonale unique à la colonie.

Gardienne et une butineuse

Une butineuse contrôlée à son retour par une gardienne.

Butineuses

Les abeilles les plus âgées remplissent la fonction de collecte des ressources : le butinage.

Suivant les colonies, les ouvrières âgées entre 7 et 60 jours (en moyenne 21 jours) sortent de la colonie et commencent par réaliser des vols de repérage afin de caractériser l’environnement proche et éloigné de la ruche. Durant ces vols, les butineuses apprennent également à reconnaître les fleurs mellifères par leur formes, couleurs, odeurs et goût.

Le nectar est niché dans les nectaires des fleurs mellifères, généralement positionné au fond de la corolle de ces fleurs. Le pollen est, quant à lui, récolté par un processus complexe utilisant les poils de tout le corps des butineuses. Les butineuses se chargent ainsi en pollen, qu’elles compactent ensuite en une boule de pollen grâce à une petite quantité de nectar placée sur un emplacement particulier des pattes arrière : la corbeille.

Les butineuses peuvent récolter à la fois du nectar et du pollen ou être spécialisées dans l’une de ces ressources. Cette activité est particulièrement exigeante pour les butineuses, qui parcourent de grandes distances de vol et visitent des milliers de fleurs. De ce fait, elles meurent peu de temps après cet exercice, en moyenne après 4 à 5 jours de butinage.

Abeille butinant un prunelier

Une abeille butinant un prunelier.